Les écrivains / adhérents
Marie-Hélène Prouteau
Poésie / Roman / EssaisMarie-Hélène Prouteau est née à Brest et vit à Nantes. Formation littéraire et philosophique en khâgne au lycée Fénelon puis à La Sorbonne. Agrégée de lettres, titulaire d’un DEA de littérature contemporaine, elle a enseigné les lettres en classes préparatoires. Elle s’est intéressée aux œuvres de Marguerite Yourcenar, est membre de la Société Internationale d’Etudes Yourcenariennes. Très sensible à la situation et à la lutte des femmes, elle a, entre autres, réalisé une étude universitaire sur « Marguerite Duras, Elsa Morante, Anna Seghers, Elsa Triolet, les romancières et la seconde guerre ».
Son inspiration s’attache aux vies anonymes, courageuses de femmes, enfants et hommes frappés par l’histoire selon l’approche de Walter Benjamin. L’art est toujours un allié puissant, en particulier la peinture de La Tour, Turner, Gauguin ou de plasticiens contemporains, Michaël Gaumnitz. Le choix d’un destin féminin libre, la respiration intérieure au plus près de la nature et de la mer, motifs présents dans tous ses livres, traversent aussi son dernier ouvrage, la biographie littéraire de Madeleine Bernard, muse restée longtemps dans l’ombre des grands peintres.
Dans ses écrits, dans son enseignement, elle aime s’ouvrir à d’autres. Par ses notes critiques en revue - Europe Terres de femmes, À la littérature, Terre à ciel, Paysages Écrits, Recours au poème, La pierre et le sel, Poezibao, Le Capital des mots, Place de la Sorbonne. Et dans les rencontres avec Dimitri Baranov, Michel Chaillou, Julien Gracq, Robert Badinter, Paul Ricoeur, moments forts qui s’inscrivent dans ses écrits.
Bibliographie
Livres publiés :
– Les Blessures fossiles, La Part Commune 2008.
– Les Balcons de la Loire, La Part Commune 2012.
– L’Enfant des vagues, Apogée 2014.
– Livres pauvres réalisés avec Ghislaine Lejard, 2015, 2017.
– Nostalgie blanche, livre d’artiste avec Michel Remaud.
– La Petite Plage, La Part Commune 2015, sélection Prix J.J.Rousseau de l’autobiographie 2016.
– La Ville aux maisons qui penchent, La Chambre d’échos 2017.
– Le cœur est une place forte, La Part Commune, mars 2019.
– La Vibration du monde, poèmes pour le livre d’artiste avec Isthme-Isabelle Thomas, édition du Quatre, 2021.
– Madeleine Bernard la Songeuse de l’invisible, éditions Hermann, 2021.
Préfaces :
Préface de Les Yeux de Sacha, Karel Pecka, 2019, éditions Alidades.
Préface à Lauzes d'Angèle Paoli, éditions Al Manar, mars 2021
Préface de Son Corps d'ombre, Marilyne Bertoncini, Ghislaine Lejard, 2021, éditions Zinzoline.
Anthologies et revues numériques :
« La Rade et l'Indien d'Amérique », Cahiers de l'Iroise, Hors Série « Vues sur rade » et revue À la littérature.
« Pêcheuses de goémon » Gauguin, au Pouldu et la vague d’Hokusaï, revue À la littérature.
« Sur la ruine d'Ur. Que détruit-on quand on détruit une ville », revue À la littérature.
« Vers allemands » sur une promenade de Paul Celan à Brest en 1961, revue Incertain regard, novembre 2018 et À la littérature.
« Madame Keravec », Agence Bretagne Presse, web media, « Monde en poésie », 2017.
« Le dialogue des morts » extrait de La Petite plage, Atelier numérique Sylvie E. Saliceti.
« Lampedusa. Jadis en un grand prieuré », La pierre et le sel, février 2018.
« Les mains d’Érasme », revue Incertain regard, novembre 2017.
« Masque Kanaga », anthologie, revue Recours au poème.
« Les Machines, les Livres », Plateau des Capucins Brest, revue Terre à ciel.
« Lettre à Asli Erdogan », écrivaine turque emprisonnée, revue Ce qui reste.
« Les marées de l’imaginaire » La faute à Rousseau, revue de l’autobiographie octobre 2016. « Chambre d’enfant gris tristesse », sur un tableau d’Olga Boldyreff, revue Terres de femmes.
« La croisière immobile », revues Place Publique, Nantes et Terres de femmes.
« Stèle du chemin de l’âme », hommage à Victor Segalen, site association Victor Segalen.
« Sagesse de la poussière », portrait de Mandela par Louis Le Brocquy, revue Terre à ciel.
« Bord de l’Elorn », revue Le Capital des mots.
« La tristesse du magnolia. Pour Libertaire Rutigliano », revues Place publique et Le Capital des mots.
« Élégie du 4 juin » de Liu Xiaobo, poète chinois, Nobel de la paix, emprisonné, revue Poezibao.
« Hommage à Yves Landrein », revue Décharge, n°159, septembre 2013.
« Couleurs d’enfance » revue Spered Gouez n°19, « Mystiques sans dieu(x) ».
« Le temps dans L'Œuvre au Noir », revue S.I.E.Y. n° 15, 1995.
« Étude sur Denier du rêve de Marguerite Yourcenar » revue S.I.E.Y, n° 13, juin 1994.
Publications collectives :
– « Les armes de la non-violence », dans Quatrevingt-treize, 2002, Ellipses, Paris
– « Roman d’apprentissage et amitié », dans Les Faux-Monnayeurs, 2001, Ellipses, Paris.
– « Héroïsme et ironie », dans La Chartreuse de Parme, 2000, Ellipses, Paris.
– « Héros et épopée » dans L’Iliade, 2000, Ellipses, Paris.
– « Le visage fantomatique de la ville » dans Nouvelles de Pétersbourg, Gogol, 1998, Ellipses, Paris.
– « Pétersbourg vu par quelques écrivains russes », 1998, Ellipes, Paris.
– « L’épopée et le grotesque dans Les Châtiments », 1998, Ellipses, Paris.
– « Le sublime et la sublimation dans l'écriture de soi » dans Mémoires d'Hadrien, 1997, Ellipses, Paris.
– « Évolution du roman d'apprentissage européen », 1995, Ellipses, Paris.
– « Les pionnières de l’autre siècle », premières filles en classes préparatoires en 1925, in Le lycée Clemenceau- 200 ans d’histoire. J. Guiffan, J. Barreau, J.-L. Liters, Éditions Coiffard.
Dossiers Marie-Hélène Prouteau en revues et ouvrages collectifs :
– « Marie-Hélène Prouteau » p178,179, in Femmes de Lettres en Bretagne, Matrimoine littéraire et itinéraires de lecture. Éditions Goater, 2021.
– « Questions à Marie-Hélène Prouteau » Les Blessures fossiles, Dialogues Brest, Youtube.
– Interview de Daniel Morvan, "Le Cœur est une place forte", Le Capital des mots, en ligne.
– Entretien avec Laurence Bellon, "L’Enfant des vagues", Dialogues Brest, en ligne.
– avec Isabelle Lévesque, Madeleine Bernard, Terre à ciel, en ligne.
– Chroniques du matrimoine breton, L’Île aux femmes, Madeleine Bernard, Corlab, web.
Lectures et interventions :
Rencontres de Sophie-philosophia, 2010, 2019. Lecture de La Petite Plage avec le comédien Jean-Pierre Gaillard, Aber Benoît. Lecture à l’Université Permanente Nantes avec la comédienne Sylvie Hervé. Lecture au Passage Sainte-Croix. Journées nationales de l’autobiographie. Lecture à Casa, Nantes, autour de Nelson Mandela avec R. Cornthwaite. Théâtre de La Ruche, Nantes avec le musicien Pol. Intervention au Musée d’art de Nantes autour de « Le Gaulage des pommes » d’Émile Bernard. Conférence à l’Université Permanente « Madeleine Bernard une muse dans l’ombre de génies » YouTube. Lecture collective d’artistes en solidarité avec Asli Erdogan. Biennale du livre d’histoire 2021, « Femmes dans l’histoire » YouTube…
Extraits
Madeleine Bernard la Songeuse de l’invisible, éditions Hermann, 2021.
Sur les tableaux de Gauguin, d’Émile Bernard, sur les photos, Madeleine est la songeuse. La tête appuyée sur sa main, sa pose familière. Elle a cette fragilité tremblée où se devine une étrangeté dans l’être. Et tant de questions. Être indépendante en ne suivant pas la voie balisée du mariage, choisir la liberté d’être soi, y compris contre une mère tyrannique. Consacrer à Émile sa généreuse énergie jusqu’à l’oubli de soi, comme Théo avec van Gogh. Être une muse moderne, tout en étant dans la jouissance claire des mystiques. Est-ce possible ?
Dans cette biographie littéraire, j’ai cherché à retrouver la juvénilité de la voix de Madeleine. Celle de ses lettres (1) qui sont, par moments, pure méditation. Glisser ses mots à elle et ceux d’ Émile, à l’entame de chaque chapitre, tresser les miens à leur écoute, c’est tenter de saisir les harmoniques ténues d’une subjectivité. Pas seulement celle d’une sœur adorée. Pas seulement celle de l’aimée de Gauguin ou d’Augustin de Moerder. Le témoin de plein cœur d’un moment de l’art. Qui est-elle cette jeune femme incandescente ?
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(1) Lettres de Madeleine à Émile Bernard, à ses parents, à sa grand-mère, à Charlotte Joliet. Lettres à Madeleine Bernard de ses parents, d’Émile Bernard, de Paul Gauguin, de Charlotte Joliet.
La Ville aux maisons qui penchent. La Chambre d’écho, 2017.
Le rire des soldats allemands.
"Place Marc Elder, Nantes. Il y a soudain comme une vibration dans les pierres du tuffeau quand on lève les yeux vers les fenêtres. Derrière l’une d’elles, un enfant s’est approché pour voir. C’est un petit réfugié juif, de douze ans. Le soleil de fin de matinée, ce 19 juin, illumine la blancheur des pierres. Devant le pont-levis du château, quatre hommes sont descendus de leur moto. Ils sont en bras de chemise. Il flotte un air de vacances. L’enfant a froid, pourtant. Plus un bruit dans la ville. On dirait qu’elle retient son souffle. L’éclat du soleil sur la mitraillette en bandoulière des soldats allemands se plante dans son cœur. Quelque chose se déchire en lui.
C’est alors qu’il entend leur rire. L’enfant comprend : avec ce rire commence le temps des loups.
Du temps passera. Bien plus tard, il reviendra dans cette ville. Invité à l’occasion du Bicentenaire du lycée Clemenceau de Nantes où il fut élève. Quand il évoquera l’entrée des Allemands dans la ville, à nouveau, il éprouvera ce froid. Éblouis, sans perdre une de ses paroles, nous écouterons Robert Badinter".
[…]
Voici que résonne la voix du philosophe Paul Ricœur au Temple Protestant. Il lit un extrait de l’Édit de Nantes pour le 400ème anniversaire de l’événement. Une conférence avec les étudiants. Si la mémoire est nécessaire, nous dit cette parole généreuse, les hommes ont aussi besoin de l’oubli, sinon ils demeurent enfermés dans les barbelés de la haine. Message bien peu accordé à notre époque.
La Petite plage, Éditions La Part Commune, 2015, sélection du prix J.J.Rousseau 2016.
« Demeurer, c’est habiter un lieu et habiter un temps. Un temps qui n’est pas uniquement le présent. Un lieu qui n’est pas uniquement un espace. François Cheng parle de « sentiment-paysage » pour dire la connivence entre l’esprit humain et l’esprit du monde. Oui, s’il y a une joie à communier ici dans la présence simple, elle a pour moi un goût de force sauvage et douce à la fois. C’est un champ d’attentes et de tensions que ce lieu a ouvert en moi. Des poussées de vie continue travaillent de même façon l’affolement des oyats, les gesticulations des tamaris, les passes d’armes du vent. L’énergie catapultée par les vagues gonflées d’écume, je la sens passer tout au fond de moi. La logique et la rigueur alors me quittent, je ne suis plus sûre de ma réalité. Tout ce qui vient du ciel, des vagues, je le reçois en pleine poitrine, sans résistance, presque dopée par cette vitalité prodigieuse qui traverse mes os, mes mots.
Quelle fête des contraires elle dispose à son gré ! Sur l’horizon de ses matins, le proche et le lointain se rapprochent. Dans ses vagues, se mêlent la violence et la douceur, l’éphémère et l’atemporel. Comme dans les moments limites de certains beaux rêves où l’on goûte le bonheur naïf de voir, contre toute attente, des choses opposées se tenir ensemble. Ses rochers, ses sables, ses vagues sont bien réels mais il émane d’eux un je-ne-sais-quoi de magique qui transporte dans un autre univers. La petite plage, c’est la clairière des métamorphoses. »
L'Enfant des vagues, Éditions Apogée, 2014
Il dévala le sentier qui menait à la plage où il n’y avait encore personne. Il s’avança tout près du bord de l’eau et stoppa net, incapable de bouger. C’était bien plus horrible que vu de la corniche ! Les vagues, alourdies par une bouillie noire et visqueuse se traînaient. Comme de pauvres bêtes prises au piège qui se débattent sans force ! Son regard allait et venait, sans comprendre, des vagues aux rochers proches, puis au ciel gris avec un peu de bleu. Il revenait aux nappes. Il aurait voulu plonger la main mais cette eau noire et lourde comme du plomb lui faisait horreur. Il était toujours paralysé, la gorge serrée. Ses idées s’embrouillaient. Qu’est-ce qui arrive à la mer ?
Lieu de vie
Pays de la Loire, 44 - Loire-Atlantique
Types d'interventions
- Rencontres et lectures publiques
- Rencontres en milieu universitaire