Les écrivains / adhérents
Geneviève Parot
Poésie / Roman / RécitsMa première passion est le théâtre. Je le découvre à l’Université, au cours de mes études de Lettres à Clermont-Ferrand, dans l’effervescence des années 70. Je m’engage à fond dans l’aventure collective de cet « art total », au sein de plusieurs compagnies en région. Je passe de Fassbinder à Marguerite Duras, de Brecht à Molière et Corneille, de l’improvisation à l’alexandrin, l’expérience du jeu s’enrichit avec l’assistanat, l’écriture de scénarii, d’adaptations, de chansons. À la fin des années 80, j’ai le sentiment d’être dans une impasse, de toucher mes limites et celles de mon environnement artistique. Je change de métier et de milieu, et travaille durant six ans comme rédactrice dans la communication et le journalisme.
C’est dans cette période, à l’approche de la quarantaine, que l’écriture – cette fois-ci personnelle - s’impose à moi, comme une résurgence de la nécessité de créer. J’écris une soixantaine de nouvelles, dont une dizaine sont à ce jour publiées. Je renoue avec les études littéraires et finalise ma maîtrise par un mémoire consacré à « Claude Simon et la photographie ». Je retrouve avec bonheur l’art dramatique comme professeur en créant l’enseignement de spécialité Théâtre au lycée d’Aubusson, en partenariat avec la Scène Nationale de cette ville.
Mon premier roman, « Trois sœurs », est publié chez Gallimard, et me vaut d’être parmi les lauréats du Festival du Premier Roman de Chambéry. « La folie des solitudes » est publié en 2009. De nombreuses rencontres, lectures et ateliers avec divers publics ont lieu à l’occasion de ces publications. Une bourse Stendhal à Naples en 2007 débouche sur un récit de voyages, mais le troisième roman qui y prend naissance n’a pas encore trouvé sa forme définitive. En octobre 2018, je pars en résidence d’écriture au monastère de Saorge, et au printemps 2019, je suis en résidence pour deux mois à la Villa Marguerite Yourcenar pour un quatrième roman en cours d’écriture.
Photo : © Bruno Dewaele
Bibliographie
Romans :
2005 : « Trois sœurs », collection blanche, Gallimard
2009 : « La folie des solitudes », collection blanche, Gallimard
Récit de voyage :
2008 : « Neapolis », dans la revue Le journal des lointains, éditions Buchet Chastel
De 1992 à 2002, une dizaine de nouvelles sont publiées dans la presse, en revue littéraire (Nouvelle Donne et Encres Vagabondes), et en recueils collectifs , notamment celui des textes primés au Festival de Saint Quentin 1993.
Une de ces nouvelles, « La signature » (publiée en 1997 dans Nouvelle Donne) a été adaptée au cinéma en 2001 par Philippe Murgier, sous le titre « Le portrait » .
Poésie :
1998 : « Oualidia », livre d’artiste à tirage limité, seize haïkus et leur traduction en arabe, accompagnés d’œuvres originales de Pierre Passani
Extraits
« Trois Sœurs, un long silence »
Si souvent Simone est montée les voir en cachette. Pour leur dire que c’était trop dur d’être fille unique, sœur de fantômes angéliques, objet unique de passion, pointe d’un triangle autour de la table ronde où naguère ils formaient une étoile à cinq branches. Pour se plaindre de leur abandon. Au début il lui semblait qu’elles allaient lui parler, lui dire ce qu’elles n’avaient pas voulu lui confier avant. Elles avaient l’air si vivantes, sanglées dans leurs robes claires, crânement coiffées de leurs bérets à pans, Marie épaule contre épaule avec Simone – comme j’étais déjà grande, pense celle-ci avec étonnement, et si maigre encore ! – , Marthe assise devant elles, un peu voûtée, comme elle sera toute sa vie, une main posée sur celle que Marie a mise sur son épaule – si complices, les deux aînées. Et autour d’elles, ce printemps qui éclatait, ces eaux vertes, la neige encore sur les montagnes. Harmonie trompeuse. Comment ses sœurs avaient-elles pu promener partout cette allure tranquille, cette dévotion joyeuse, comment avaient-elles pu écrire « à bientôt » au dos de la carte postale qu’elles avaient envoyée à leurs parents, comment avaient-elles pu parler de leur vie ici aussi calmement que si elles eussent pensé sincèrement que tel était leur destin, et que l’idée de s’éloigner un jour de cette vie-là ne les avait jamais effleurées !
« La folie des solitudes »
Il a été là. Il a fait ce que font les hommes. Il est né, il a vécu, il a couru dans les chemins, criant après le vent, après ses bêtes, après le sort, remâchant son enfance, buvant des vins mauvais, braconnant dans la nuit, menant des filles au bal qui avaient peur de lui, bramant, riant, pleurant, et se taisant soudain, effrayé de ses propres pensées. Il a été de ce monde-là. De cela seul je suis sûre. Il a été de ces travaux et de ces jours, de ces gestes, de ces violences, triomphant et vaincu, faraud et dépité, solaire et nocturne.
Toutes ces images de lui se superposent. Son histoire est éparpillée dans les mémoires, éclatée, déformée, abâtardie. Et je suis là à mon tour, arpentant les mêmes chemins, usant les mêmes ornières, les mêmes talus, courant après l’odeur de l’océan, marchant, marchant toujours, buvant les vents mauvais et les paroles enfuies, braconnant un regard, glanant un geste, collectant ce qui tombe des vies, larguant mon passé pour le leur, ma vie pour leurs paysages. Je ne peux pas faire autrement que de lui ouvrir mes pages pour qu’il les remplisse de l’encre noire de son histoire.
Ma bibliothèque
Pêle-mêle : Toni Morrison, Eudora Welty, Flannery O’Connor, Nancy Houston, William Faulkner, Kazuo Ishiguro, Joseph Conrad, Julien Gracq, Claude Simon, Marguerite Yourcenar, Pierre Michon, mais aussi Fernando Pessoa, Philippe Jaccottet, Henri Michaux, les haïkus de Bashô, Buson, Issa, et bien d’autres…
Lieu de vie
Auvergne-Rhône-Alpes, 63 - Puy-de-Dôme
Types d'interventions
- Ateliers d'écriture en milieu scolaire
- Rencontres et lectures publiques
- Ateliers / rencontres autres publics
- Résidences
- Rencontres en milieu scolaire